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107 P - 10/79 - Berufungskammer der Zentralkommission (Berufungsinstanz Rheinschiffahrt)
Entscheidungsdatum: 24.01.1979
Aktenzeichen: 107 P - 10/79
Entscheidungsart: Urteil
Sprache: Französisch
Gericht: Berufungskammer der Zentralkommission Straßburg
Abteilung: Berufungsinstanz Rheinschiffahrt

CHAMBRE  DES  APPELS DE  LA COMMISSION  CENTRALE  POUR  LA NAVIGATION  DU  RHIN

ARRÊT

du 24.01.1979

(rendu en appel d’un jugement du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg du 18 octobre 1978 - 1 E 1810/78)

EN FAIT:

ATTENDU que le prévenu a interjeté appel contre le jugement du 18.10.1978 du Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg et soulevé l’exception de nullité de la citation à comparaître délivrée le 5 juillet 1978 au Parquet du Tribunal pour la Navigation du Rhin selon la procédure prévue à l’article 562 du Code de procédure pénale français pour les personnes demeurant à l’étranger, au motif d’une part, que cette procédure violerait la disposition de l’article 40 de la Convention Révisée pour la Navigation du Rhin qui dispose que "pour ce qui concerne les personnes ayant un domicile connu dans un des Etats riverains, les citations et exploits dans ces causes seront notifiés à ce domicile" et d’autre part, parce que non accompagnée d’une traduction en langue allemande, la citation aurait été délivrée au mépris de la Convention européenne des Droits de l’Homme du 4 novembre 1950, ratifiée par la France le 3 mai 1974, laquelle stipule en son article 6 que le prévenu "a droit notamment à être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend, et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui".

ATTENDU que le prévenu soulève également l’exception de nullité de la notification de la citation faite à son domicile le 16 août 1978 pour avoir pareillement violé la Convention européenne des Droits de l’Homme et subsidiairement, pour être intervenue alors que les faits servant de base à la prévention étaient prescrits.

EN DROIT:

Sur la violation de la Convention révisée pour la navigation du Rhin.

ATTENDU que l’article 40 paragraphe 3 de la Convention révisée pour la navigation du  Rhin exige, en ce qui concerne les parties ayant un domicile connu dans un des Etats riverains, que les citations et exploits soient notifiés à ce domicile.

ATTENDU que la formalité de notification à domicile a été accomplie le 18 août 1978 par signification à la personne du prévenu.

ATTENDU que cette notification, ainsi qu’il ressort du dossier a eu lieu conformément aux prescriptions de forme du Code de procédure pénale allemand pour les notifications à domicile et satisfait également aux dispositions de l’article 552 du Code de procédure pénale français qui exige que les citations des parties demeurant à l’étranger et notamment en République fédérale d’Allemagne, en vue de leur comparution, interviennent au moins deux mois avant la date de comparution.

QU’en conséquence, il n’y a pas lieu d’accueillir l’exception de nullité de la citation à comparaître pour violation des dispositions de la Convention révisée pour la navigation du Rhin.

Sur la violation de la Convention européenne des Droits de l’Homme.

ATTENDU que la Convention européenne des Droits de l’Homme énonce un certain nombre de principes généraux tel que le droit à la liberté et à la sûreté et, pour ce qui concerne l’article 6 en cause, le droit à un procès équitable et énumère également, d’une façon d’ailleurs exemplative, des droits subséquents et des règles plus précises et con¬crètes dont la violation peut directement ou indirectement affecter ou vider de leur substance les garanties fondamentales qu’on a entendu protéger.

QUE parmi ces droits subséquents visés à l’article 6.3 de ladite Convention figure le droit pour le prévenu à être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui.

ATTENDU que c’est à tort que le Ministère Public a interprété dans sa plaidoirie la Convention européenne d’entraide judiciaire du 20 avril 1959 comme validant, au regard en particulier de la Convention européenne des Droits de l’Homme, la rédaction de la citation dans l’une quelconque des langues officielles du Conseil de l’Europe nonobstant le fait que le prévenu n’est pas en mesure de la comprendre.

QU’en effet, si la Convention européenne d’entraide judiciaire, qui constitue au demeurant un arrangement administratif entre Parties Contractantes, prévoit la faculté de rédiger les actes transmis aux autorités compétentes de la République fédérale d’Allemagne soit en langue allemande, soit dans l’une des langues officielles du Conseil de l’Europe, elle ne préjuge nullement des conditions qui doivent encore être respectées en vertu des dispositions de la Convention européenne des Droits de l’Homme que la Convention d’entraide judiciaire n’affecte nullement, comme il l’est expressément stipulé dans l’ article 26 de cet instrument.

ATTENDU cependant que la violation des droits à l’information du prévenu décrits à l’article 6.3 de la Convention européenne des Droits de l’Homme n’entraîne pas pour autant la nullité de la citation faite à personne mais constitue simplement un obstacle s’opposant à ce que le Tribunal rende un jugement alors qu’il ne ressort pas du dossier que le prévenu était en mesure de comprendre la nature et la cause de la prévention énoncée dans la citation.
 
ATTENDU qu’il échet d’annuler le jugement par défaut dont appel, rendu en violation des dispositions de la Convention européenne des Droits de l’Homme concernant le droit à l’information du prévenu.

ATTENDU qu’il n’est point besoin d’examiner les autres moyens soulevés et notamment ceux tirés de la prescription.

PAR CES MOTIFS, la Chambre des Appels:

- Reçoit l’appel du prévenu POTTMANNI régulier en la forme,

- Le déclare fondé,

- Annule le jugement du Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg du 18 octobre 1978,

- Dit que les frais de la procédure d’appel sont à liquider conformément à l’article 39 de   la Convention révisée pour la navigation du Rhin, par le Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg.