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94 Z - 21/79 - Berufungskammer der Zentralkommission (Berufungsinstanz Rheinschiffahrt)
Entscheidungsdatum: 19.04.1978
Aktenzeichen: 94 Z - 21/79
Entscheidungsart: Urteil
Sprache: Französisch
Gericht: Berufungskammer der Zentralkommission Straßburg
Abteilung: Berufungsinstanz Rheinschiffahrt

CHAMBRE DES APPELS DE LA COMMISSION CENTRALE POUR LA NAVIGATION DU  RHIN


ARRÊT

du

19.04.1978

(Rendu en appel d’un jugement du Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg du 19 avril 1978 - 3 C 76/74 -)

EXPOSE DES FAITS:

Le 10 avril 1973 une collision s’est produite sur le Rhin entre deux bateaux automoteurs, à savoir:

- le H, immatriculé aux Pays-Bas, appartenant à « D », d’un port en lourd de 779 tonnes.

- le HA, immatriculé en Suisse, appartenant à REEDEREI Z A.G., d’un port en lourd de 1.297 tonnes.

Le "H", chargé de gravier, s’est brisé et a coulé presque immédiatement en travers du chenal, interrompant ainsi la navigation.

Etant donné que la responsabilité pour l’accident n’est pas en cause dans le procès actuel, il est sans importance d’examiner les circonstances de la collision.

Il peut être constaté qu’à la suite de l’accident, la Cour d’Appel de Colmar, statuant comme Tribunal supérieur de la navigation du Rhin, condamna par son arrêt rendu le 5 juin 1974, V  qui pilotait le « HA » à une amende de 600 francs  en reprochant au prévenu d’avoir violé son devoir de vigilance (Règlement de Police de la navigation du Rhin 1.04) et d’avoir omis en tant que bâtiment montant, de réserver à l’avalant une place appropriée (infraction à l’article 6.03 et 6.22 du même règlement). Aucune poursuite ne fut intentée contre le capitaine et armateur du H.

Le bâtiment coulé se trouvait en territoire français de sorte qu’il appartenait en conséquence à l’administration française de prendre toutes les mesures qui s’imposaient.

Le Service de la navigation de Strasbourg a immédiatement après l’accident, pris des dispositions pour rétablir la navigation par l’aménagement de deux chenaux provisoires permettant, sous certaines conditions, le passage des bateaux montants et avalants. Ces mesures étant toutefois précaires, il convenait, pour éviter tout risque de nouvel accident, de retirer du lit du fleuve dans les plus brefs délais l’épave du H.

Le Service de la navigation de Strasbourg a mis en demeure le propriétaire du H de relever l’épave du bateau. Le propriétaire a déclaré qu’il ne disposait d’aucun moyen matériel pour prendre en charge tout ou partie des frais d’enlèvement de l’épave et qu’il abandonnait ses droits de propriété sur celle-ci.
Devant la défaillance du propriétaire du bateau "H" et compte tenu de l’urgence des travaux, le Service de la Navigation a pris les dispositions nécessaires et a fait enlever l’épave, les frais de ces opérations s’élevant à plus de 1.000.000 francs.

Par acte introductif d’instance du 10.1.72 l’ETAT FRANÇAIS a cité le sieur B devant le Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg pour entendre dire et juger que le défendeur est tenu de rembourser à l’ETAT FRANÇAIS les frais et débours résultant des tra¬vaux nécessaires pour le rétablissement de la navigabilité tels qu’ils résulteront d’un décompte des travaux s le voir condamner en tous les frais et dépens; entendre déclarer le jugement exécutoire par provision sous caution.

Par acte introductif d’instance, qualifié d’"Assignation en intervention du 9.7.1974", l’"Etat Français" a cité la REEDEREI Z A.G. devant le même tribunal pour la voir condamner conjointement et solidairement avec le sieur DE BOER à payer à l’"Etat Français" la somme de 1.000.000 francs ou tel montant en plus ou en moins qui pourrait être fixé après complet achèvement des travaux de le voir condamner conjointement et solidairement aux frais; entendre déclarer le jugement exécutoire par provision.

Par introductif d’instance, appelé "mise en cause" du 5.12.74 le sieur de BOER a cité la REEDEREI Z A.G. et le sieur V BB à les voir condamner à garantir de "B" de toutes condamnations en principal, intérêts et frais dont il pourrait être tenu à l’égard de l’"ETAT FRANÇAIS" et ce solidairement, subsidiairement "in solidum" et aux frais et dépens de la mise en cause; en tout état de cause à voir condamner l’ETAT FRANÇAIS aux frais de la mise en cause; entendre déclarer le jugement à intervenir exécutoire par provision, si besoin moyennant caution.

Par acte introductif d’instance du 24.12.1974 la REEDEREI Z A.G. a appelé en garantie le sieur "B "et la VNN pour les voir con¬damner à relever solidairement, subsidiairement "in solidum", la REEDEREI Z A.G. de toute condamnation en principal, intérêts et frais dont elle pourrait éventuellement être tenue à l’égard de l’ETAT FRANÇAIS et aux frais et dépens de l’appel en garantie; en tout état de cause entendre condamner l’ETAT FRANÇAIS aux frais et dépens de la mise en cause et entendre déclarer le jugement à intervenir exécutoire par provision, si besoin moyennant caution.
  
Par conclusions du 9.4.75 le sieur de BOER a introduit une action reconventionnelle pour entendre  condamner l’"Etat Français" à payer au défendeur et demandeur reconventionnel, à titre de dommages-intérêts, la somme de 5000 francs avec 6 %  d’intérêts à dater de l’assignation; entendre le condamner en tous les frais et dépens; entendre déclarer le jugement à intervenir exécutoire par provision, si besoin, moyennant caution.

Par conclusions de la même date la REEDEREI Z A.G. a introduit la même action reconventionnelle contre l’"Etat Français".

Le 7.5 1975 le Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg, statuant publiquement et contradictoirement:

- a condamné "B" à rembourser à l’"Etat Français" les frais et débours résultant des travaux nécessaires pour rétablir la navi-gabilité suite à la perte du H;

- a débouté "B" de sa demande reconventionnelle;

- a réservé à statuer sur le montant et sur la mise en cause de la REEDEREI Z A.G. ;

- a fixé la continuation des débats au 4.6.75.

En date du 13.6.75 le sieur B a interjeté appel contre ce jugement du 7.5.1975, déclarant expressément porter l’appel devant la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin.

Par requête datée du 7,10.75 la REEDEREI Z A.G. mise en cause par l’ETAT FRANÇAIS en cours de 1ère Instance a manifesté son intention de se porter partie intervenante dans la procédure d’appel.

Par mémoire du 17.11.75 la REEDEREI Z A.G. s’est portée partie intervenante en demandant d’être citée aux débats oraux dans cette procédure devant la Chambre des Appels et a présenté des observations tant sur la procédure que sur le fond.

L’appelant B s’est opposé à cette intervention en demandant à la Chambre des Appels de déclarer "de plein droit" les conclusions de la REEDEREI Z A.G. irrecevables.

Par son ordonnance du 15.1.76 la Chambre des Appels a déclaré au principal.

- qu’elle admet la participation de la REEDEREI Z A.G. dans la procédure d’appel en vertu de l’art. 13 du Règlement de procédure et déterminera sa qualité dans l’Arrêt à intervenir sur le fond,

- dit que la REEDEREI Z A.G. sera entendu lors des débats oraux qui se tiendront dans l’instance d’appel.

Par son arrêt du 22.ll.76 la Chambre des Appels, statuant sur l’appel du sieur B déclare que le Tribunal pour la Navigation du Rhin de Strasbourg n’est pas compétent pour connaître de l’action de l’ETAT FRANÇAIS introduite contre le sieur B par acte introductif d’instance du 10.1.74 et met dès lors à néant le jugement du Tribunal pour la navigation du Rhin de Strasbourg du 7.5.75.

La Chambre des Appels constate que l’art 1.18 du Règlement de Police pour la navigation du Rhin crée une obligation objective d’enlever le bâtiment échoué à la charge du conducteur. Cette obligation objective est étrangère à toute idée de faute dans le chef du conducteur. L’action basée sur une telle créance est totalement étrangère à l’art.34/II/c de la Convention de Mannheim de sorte que les tribunaux pour la Navigation du Rhin ne sont pas compétents pour en connaître.

En date du 19.4.78 le Tribunal pour la ’navigation du Rhin de STRASBOURG a prononcé son jugement:

a) sur l’action en intervention entamée par acte introductif d’instance en date du 15.7.74 par l’ETAT FRANÇAIS contre la REEDEREI Z A.G. pour l’entendre condamner conjointement et solidairement avec le sieur B à payer à l’ETAT FRANÇAIS la somme de 1.000.000 francs ou tel montant en plus ou en moins qui pourrait être fixé après complet achèvement des travaux et

b) sur l’action reconventionnelle formée par la REEDEREI Z A.G., tendant à la condamnation de l’ETAT FRANÇAIS à payer à l’appelée en intervention et demanderesse reconventionnelle à titre de dommages-intérêts la somme de 5000 Francs avec 6% d’intérêts à dater de l’assignation et la condamnation en tous les frais et dépens. Le tribunal, statuant publiquement, contradictoirement et en 1er ressort.

A. Quant à l’action en intervention forcée dirigée contre La REEDEREI Z A.G.:

- déclare l’ETAT FRANÇAIS irrecevable en son action

- le condamne aux entiers dépens.

B. Quant à la demande reconventionnelle:

- condamne l’ETAT FRANÇAIS à payer à la REEDEREI Z A.G., demanderesse reconventionnelle, la. somme de 2.000 Frs avec les intérêts légaux à compter du jour du jugement

- le condamne aux entiers dépens nés de là demande reconventionnelle.

Les motifs sont les suivants:

A - Quant à la recevabilité de l’action de l’ETAT FRANÇAIS:

- La recevabilité d’une demande en intervention forcée s’apprécie en fonction des règles de droit applicables au moment où le Tribunal est saisi de cette action, en l’espèce le 15.7.74.

- à cette époque la procédure civile et en particulier en matière d’intervention dans un procès en cours, était encore régie par le code de procédure Civile locale, complété par certaines règles du droit français introduites par la loi du 1.6.24.

- le législateur de 1924 a maintenu les articles 64 à 71 du C.P.C. relatifs à l’intervention principale et à l’intervention accessoire, mais a abrogé la mise en cause des articles 72 à 77 du C.P.C.,

- dans le but de remplacer la mise en cause, le législateur de 1924 a introduit l’appel en garantie prévu par les articles l8l à 185 du C.P.C. métropolitain, ainsi que la tierce opposition, prévue par les articles 474 à 479 du même code.

- le code n’a rien prévu, en dehors de l’appel en garantie, pour permettre à une partie de forcer à intervenir, pour le couvrir, un tiers récalcitrant.

- pour parer à cet inconvénient la doctrine et la jurisprudence des tribunaux de Vieille-France ont reconnu aux parties le droit d’obtenir ce résultat en créant de toutes pièces la demande en déclaration de jugement commun, qui a pour but de rendre le jugement sur l’affaire en cours opposable à une personne qui, si elle n’était pas partie à l’instance, pourrait plus tard opposer la relativité de la chose jugée ou même prendre l’initiative d’attaquer ce jugement par tierce-opposition.

- la jurisprudence locale a été amenée à juger que le législateur de 1924 a aussi entendu mettre en vigueur dans les trois départements alsaciens et lorrain la jurisprudence qui s’était alors formée en Vieille-France sur l’assignation d’un tiers en déclaration de jugement commun.

- la jurisprudence locale n’est pas allée plus loin et n’a pas admis la possibilité de former, en cours de procédure, une demande en intervention forcée tendant, non plus seulement à faire déclarer un jugement commun, mais, comme c’était le cas pour la présente demande de l’ETAT FRANÇAIS, à des condamnations conjointes et solidaires d’un tiers avec le défendeur au procès.
 
B - Quant à la demande reconventionnelle :

- il paraît inéquitable de laisser à la charge de la REEDEREI Z A.G. les sommes exposées par elle pour sa défense et non comprises dans les dépens

- en application des dispositions de l’article 400 du N.C.P.C. le tribunal estime devoir mettre de ce chef une somme de 2000 Francs à la charge de l’ETAT FRANÇAIS.

Par acte d’appel, dont l’original a été déposé au greffe le 23.5.78, l’ETAT FRANÇAIS a interjeté appel contre ce jugement, déclarant expressément porter l’appel devant la Commission Centrale pour la navigation du Rhin, Chambre des Appels à STRASBOURG.

L’ETAT FRANÇAIS a conclu comme suit:

- Plaise à la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin:

- infirmer le jugement du tribunal pour la Navigation du Rhin du 19.478.

- déclarer recevable l’action de l’ETAT FRANÇAIS contre la REEDEREI Z A.G.

- condamner la défenderesse à payer au demandeur, une somme de 1.287.335,16 francs augmentée des intérêts légaux à dater du 10.4.73.

- condamner la REEDEREI Z A.G. aux frais et dépens des deux instances.

Les motifs peuvent être résumés comme suit: a) dans l’acte d’appel du 23.5.78:

- en vertu de l’article 36 de la Convention de Mannheim la procédure pour la Navigation du Rhin doit être la plus simple et la plus prompte possible.

- l’abrogation des dispositions concernant l’intervention forcée par la loi de 1924 n’interdit pas au tribunal d’admettre la recevabilité d’une mise en cause.

- en vertu d’une jurisprudence constante, dès lors qu’une partie a le droit d’intervenir dans une  instance, il existe pour les parties au procès un droit corrélatif de l’appeler dans cette instance, même contre sa volonté.
  
- la REEDEREI Z A.G. a reconnu l’existence d’un tel droit par sa propre requête du 7.10.75, tendant à intervenir dans la procédure d’appel du sieur B contre le jugement du 7.5.75 du tribunal pour la Navigation du Rhin de STRASBOURG.

- en vertu d’une jurisprudence constante la mise en cause est recevable lorsque le créancier a d’abord assigné l’un des co-débiteurs seulement et appelle ensuite les autres co-débiteurs en cause dans la procédure pour que ce qui sera jugé a l’égard de l’un le soit également à l’égard de l’autre.

- la connexité entre les deux actions de l’ETAT FRANÇAIS contre B et la REEDEREI Z A.G. ne peut pas être sérieusement contestée.

- il conviendra dès lors de déclarer recevable l’action de l’ETAT FRANÇAIS contre la REEDEREI Z A.G. et d’évoquer l’affaire pour statuer sur le fond.

- la REEDEREI Z A.G. est responsable pour la faute de son préposé V qui a été condamné par la Cour d’Appel de Colmar comme ayant commis une contravention du Règlement de Police pour la Navigation du Rhin, art. 1.04.

b) dans sa note reprise en  plaidoirie:
- les règles de procédure, édictées par le N.C.P.C, sont, selon une jurisprudence et une doctrine unanimes et constantes d’application immédiate. Les exceptions prévues dans les articles 4 et 5 ne sont pas applicables aux articles 331 à 338, régissant l’intervention forcée.

- un appel en intervention forcée ne doit pas nécessairement se fonder sur des faits identiques et sur une même cause juridique mais il suffit qu’il y ait connexité entre les faits qui servent de fond à l’action principale et à l’action en intervention.

- l’action n’est pas prescrite, n’étant pas soumise à la prescription pénale mais à la prescription de droit commun de l’action en responsabilité à engager avant la fin de l’année suivant celle du fait dommageable.

LA REEDEREI Z A.G. a conclu comme suit:

-   Plaise à la Chambre des Appels pour la Navigation du Rhin:

- sur l’appel de l’ETAT FRANÇAIS:

- rejeter l’appel de l’ETAT FRANÇAIS

- confirmer le jugement a quo

- très subsidiairement:

- déclarer l’action de l’ETAT FRANÇAIS prescrite

- plus subsidiairement:

- déclarer l’action mal fondée

- débouter en tout état de cause l’ETAT FRANÇAIS de sa demande de dommages-intérêts

- condamner l’ETAT FRANÇAIS en tous les frais et dépens de la procédure principale.

- sur appel incident de la REEDEREI Z A.G.

- condamner l’ETAT FRANÇAIS à payer à la  REEDEREI Z A.G. par application des dispositions de l’article 700 du N.C.P.C. la somme de 10.000 francs ou de telle somme qu’il plaira à la Cour d’arbitrer, avec les intérêts légaux à compter du prononcé de l’arrêt.

- condamner l’ETAT FRANÇAIS aux entiers frais et dépens nés de la demande reconventionnelle, en tant que de besoin à titre de dommages-intérêts supplémentaires.

Les motifs peuvent être résumés comme suit:

a) sur la recevabilité de la demande:

- les deux actions de l’ETAT FRANÇAIS ont des fondements juridiques totalement différents: celle contre le sieur B est basée sur la violation d’une obligation objective à la charge du propriétaire du bâtiment coulé: celle contre la REEDEREI Z A.G. est basé sur la responsabilité aequilienne et donc la faute du conducteur.

- le tribunal n’étant pas compétent pour connaître de l’action principale contre le sieur B, doit déclarer irrecevable l’action en intervention qui s’était greffée sur cette action principale.

 - les motifs d’irrecevabilité retenus par le premier juge sont parfaitement fondés.

- la procédure demeure un élément de protection du justiciable. L’article 36 de la Convention de Mannheim n’a pas dérogé à ce principe.

- il n’y a pas de connexité entre les deux actions.

b) concernant la prescription: conformément aux dispositions de l’article 10 du Code de Procédure Pénale, toutes les fois que les faits dommageables constituent une infraction pénale, l’action civile même exercée séparément de l’action publique est éteinte par la prescription de l’action publique.

c) concernant le fond:

- le dommage allégué par l’ETAT FRANÇAIS n’est pas en rapport de causalité avec la faute commise par le préposé de la REEDEREI Z A.G.

d) concernant l’appel incident:

- l’appel de l’ETAT FRANÇAIS ainsi que son action en inter-vention sont téméraires et ont causé un dommage à la REEDEREI Z A.G. qui a le droit d’en demander la réparation sur base de l’art.700 du C.N.P.C.

EXPOSE DES MOTIFS:

Appel principal

L’appel interjeté par l’ETAT FRANÇAIS, appelant, demandeur en intervention forcée, devant la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin en date du 23.5.78 est régulier en la forme et conforme aux prescriptions de la Convention de Mannheim.

L’ETAT FRANÇAIS a interjeté appel contre un jugement statuant sur la recevabilité d’une action en intervention forcée, basé uniquement sur l’application de la loi française concernant la procédure civile, la loi locale en vigueur au moment des faits dans les trois départements alsaciens et lorrain et la

jurisprudence métropolitaine et locale. L’appelant invoque de surcroît le Nouveau Code de Procédure Civile qui, d’après lui, était entré en vigueur dans les trois départements de l’Est le 1er janvier 1977, soit avant que le jugement entrepris ait été rendu.

L’appelant n’a pas soumis ce problème purement technique et jugé sur les seuls principes du droit français à l’instance d’appel nationale mais a préféré porter son appel devant la Chambre des Appels de la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin où il invoque en premier lieu l’article 36 de la Convention de Mannheim dans lequel est dit entre autre. La procédure des tribunaux pour la navigation du Rhin sera la plus simple et la plus prompte possible.

L’appelant semble vouloir dire que même si son action en intervention forcée n’est pas recevable sur la base des principes du droit français ou local, concernant la procédure civile dont il n’aurait pas respecté les prescriptions, cette action devrait être déclarée recevable sur la base de l’article 36 de la Convention de Mannheim comme si cet article laissait au justiciable toute liberté de procédure sous la seule condition que celle-ci soit "la plus simple et la plus prompte possible".

n tel raisonnement méconnaît les principes du droit de procédure et du texte et de l’esprit de la Convention de Mannheim.

Nul peut se faire droit soi-même. Le justiciable qui veut faire valoir son droit matériel devant une instance judiciaire est tenu de respecter les règles de droit formel prévues dans les codes de procédure civiles applicables devant cette instance. L’existence de telles règles est donc strictement nécessaire pour créer pour les justiciables la possibilité d’entamer une procédure et pour garantir les droits de la défense
Les règles de procédure sont propres à chaque instance judiciaire. Bien que non identiques dans chacun des pays signataires de la Convention de Mannheim, ces règles aménagent un droit formel dont les justiciables peuvent avoir connaissance et qui garantit le respect de leurs droits.

La Convention de Mannheim ne prévoit pas de règles spéciales de procédure, applicables devant les tribunaux pour la navigation du Rhin dont elle confirme l’existence dans l’article 33. Il en résulte qu’il faut conclure que devant ces tribunaux la procédure prévue par la loi nationale est applicable.

Une telle conclusion est conforme à l’esprit de la Convention de Mannheim: en effet

- l’article 37 prévoit une double possibilité de se pourvoir en appel: soit à la Commission Centrale (article 43) soit au tribunal supérieur du pays dans lequel le jugement a quo a été rendu (article 38).

La Convention n’a pas envisagé une procédure unique pour l’appel mais s’est limitée à prévoir des prescriptions spéciales pour la procédure devant la Commission Centrale déterminant même que cette Commission doit établir le règlement de procédure de la Chambre des Appels (article 45 ter). Par contre, pour l’appel devant le tribunal supérieur national la Convention prévoit qu’on se conformera, pour la procédure, à la législation en vigueur dans le pays (article 38).

- Pour le cas où un conflit de loi serait à craindre, la convention prévoit l’application des règles de procédure nationale (article 37 et 40).

- Dans l’article 30 du Règlement de procédure de la Chambre des Appels de la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin